Comme la plupart des petites filles, je rêve depuis toujours de LA robe que je porterai le jour de mon mariage. Je m’imaginais ressembler à une vraie princesse. Cette robe parfaite et blanche, bouffante, composée d’une dentelle aussi fine que possible, une longue traîne, de magnifiques bretelles. Et pour la compléter un voile, que mon futur époux lèverait pour me découvrir comme si c’était la première fois qu’il me voyait, tout en me regardant avec ses yeux remplis d’amour…

Toute future mariée, imagine ses essayages de robe comme un moment parfait, un moment à partager avec sa mère, sa grand-mère, ses témoins, ses ami(e)s… Bref, les personnes qui nous semblent les plus importantes pour partager ce moment de joie et d’émotions.

Moi, j’aurais aimé partager ce moment avec ma mère, mes sœurs et ma meilleure amie, seulement nous habitons loin les unes des autres.

C’est donc avec un immense plaisir, et honneur pour moi, que l’une de mes témoins et l’une de mes amies ont accepté de m’accompagner. D’ailleurs à travers cet article je les remercie mille fois d’avoir été là, car sans elles la journée aurait tourné au véritable cauchemar !

Vendredi 29 Janvier 2021, j’ai donc rendez-vous dans une boutique de robe de mariée, à une heure de chez moi. Peu m’importe que ce soit loin, les robes sur leur site sont magnifiques, je suis certaine que je trouverai celle de mes rêves chez eux.

J’avoue ne pas avoir dormi la veille : j’étais partagée entre l’excitation et la peur. Peur de ne pas trouver ma robe, peur qu’il n’y ait pas ma taille.

La journée commence parfaitement bien, il pleut mais dans la voiture la bonne humeur et les cookies maison pour remercier mon amie, nous couvre de bonheur. Au début de la journée, nous ne sommes que toutes les deux, mes témoins ne pouvant pas être là. Encore une fois , merci ma petite A, car sans toi, je me serais totalement effondrée !

            Arrêt sur image : je parle de journée qui tourne au cauchemar, de s’effondrer, mais que s’est-il passé pour que l’un des souvenirs les plus heureux de ma vie se déroule comme ça ?

Voici la réponse :

Nous sommes donc devant cette fameuse boutique de robe (je me retiens de vous donner son nom car le lynchage public ne me plaît pas), et attendons son ouverture en imaginant à quoi je pourrais ressembler dans les modèles exposés en vitrine. Nous rentrons, je n’ai jamais eu un tel sourire, sourire de bonheur et d’excitation.

Et là, l’humiliation commence.

En rentrant, je me présente et dis que je viens pour des essayages. La vendeuse me regarde de haut en bas, au début je ne comprends pas, et me dit d’un air hautain, de manière que les clientes déjà présentes l’entendent, cette phrase que je ne pourrais jamais oublié, « ah ! Mais pour vous il y aura un SUPPLEMENT GRANDE TAILLE ! ». Un quoi ? Mais qu’est-ce que c’est ? C’est la première fois que j’en entends parler. Je regarde mon amie et vois également que son visage se décompose, elle qui s’est mariée, n’a jamais entendu parler de ça.

J’étais donc partagée entre deux sensations : l’euphorie des essayages que j’attends depuis si longtemps, et la gêne. Oui j'étais gênée : gênée de faire ce poids, gênée d’avoir ce corps qui n’est pas le mien.

Si seulement l’humiliation s’était arrêtée là ! Mais non ça a continué.  

Cette vendeuse avait la mauvaise manie de laisser la cabine ouverte, j’avais beau essayé de la refermer, elle rouvrait toujours le rideau de façon à m’enfiler les robes devant le reste de la clientèle. Je me suis donc retrouvée à moitié nue, devant des personnes que je ne connaissais pas.

C’est en vous écrivant, chères lectrices et chers lecteurs, que je me rends compte que j’aurais dû partir, les laisser là et dire STOP à tout. Mais non, j’ai continué et le cauchemar a continué. À chaque robe que j’essayais, la vendeuse n’hésitait pas à me sortir son refrain préféré, toujours d’une voix très haute « avec cette robe aussi vous devez compter le SUPPLEMENT GRANDE TAILLE ». Je voyais mon amie bouillir, être mal à l’aise avec moi mais surtout pour moi. C’est alors qu’elle a demandé de combien était ce supplément, de quelle gamme de prix parlons-nous ? Parce qu’évidemment je n’ai pas un budget illimité. La question a été posée cinq fois, nous attendons toujours la réponse.

Le drame !

A force d’entendre que je vais avoir ce supplément grande taille, je suis mal à l’aise et je tente d’expliquer à la vendeuse pourquoi, pourquoi mon poids est ainsi. Qu’après des années de luttes contre l’endométriose, qu’après avoir eu des traitements hormonaux très forts pour m’aider à combattre cette maladie, mon corps a changé en peu de temps et j’ai pris 35 kilos.

Ces kilos pour lesquels je me bats depuis tant d’année. Et puis, je tente de lui dire que j’ai arrêté tous ces traitements, et que mon corps commence à reprendre ses formes d’antan, que d’ici quelques mois, d’ici au mariage, je devrais avoir perdu une bonne quinzaine de kilos, que ce supplément n’est donc pas nécessaire. Elle me regarde encore une fois de haut en bas, et décide d’aller chercher son patron, car elle ne veut pas prendre la décision seule.

Nouvelle humiliation, on n’est plus à ça près me direz-vous !

Le patron arrive, me regarde de haut en bas, pourtant il ne croisera jamais mon regard. Il ajuste la robe que je porte, et sur un ton méprisant me dit « avec votre carrure on ne prend pas le risque de ne pas mettre ce SUPPLEMENT GRANDE TAILLE. Vous n’avez pas le choix. Il vous faudra d’ailleurs peut-être deux suppléments ».

A ce moment-là, je me suis sentie comme une véritable paria, comme si mon procès venait d’être fait et que ce patron était à la fois, l’avocat, le juge et le bourreau.

Mais encore une fois je n’ai rien dit, à tort !

J’ai commencé à me secouer, à me dire que tout ça n’était pas normal, quand j’ai compris qu’ils se moquaient totalement de moi, je devais être leur distraction du jour. Ce moment précis a été quand j’ai demandé le prix de la robe que je portais, véritable coup de cœur qui réunissait absolument tous mes critères. Mais nouvelle douche froide, la vendeuse arrive avec sa calculatrice « alors la robe + le supplément jupon + le supplément bretelle + évidemment pour vous le SUPPLEMENT GRANDE TAILLE, ça vous fera un total de 1027 euros ».

1027 euros ?? Mais c’est largement au-dessus de mon budget, jamais je ne pourrais me payer un tel luxe !

J’enlève la robe, je leur dis que je dois réfléchir car je n’ai pas le budget. Réponse du patron, encore une fois extraordinaire et toujours d’un ton arrogant : « si vous voulez nous faisons les paiements en huit fois sans frais. Et puis de toute façon, vous n’avez pas le temps de réfléchir, vous devez nous dire au plus tard demain si vous voulez la robe car nous devons faire nos commandes. Et puis, vue la qualité de nos robes, vous ne trouverez jamais mieux ailleurs vu le travail de nos concurrents » (oui cet homme aime beaucoup les répétitions).

Nous sortons du magasin, je tente de rester digne face à mon amie, et puis dans la voiture, c’est l’incompréhension. Mais que s’est-il passé ? Pourquoi est-ce qu’on m’a traité de la sorte ? Pourquoi est-ce que j’ai accepté ça ? moi qui suis forte et qui d’habitude n’ai pas ma langue dans ma poche.

J’étais totalement anéantie, comment peut-on faire subir cela à quelqu’un ?

Je décide de reprendre du poil de la bête, tant pis la robe de ma vie ne sera pas dans leur boutique. Nous appelons le futur époux, qui a eu comme une envie d’aller les voir pour leur expliquer les choses.

Evidemment il ne l’a pas fait, mais pour une bonne raison. Alors que nous n’avions pas rendez-vous, nous sommes allées dans une magnifique boutique de robe de mariée. J’ai expliqué à la dame ce que je venais de vivre, et là, nous sommes tombées sur LA personne dont j’avais besoin pour me redonner confiance. Elle m’a tout de suite dit de revenir l’après-midi, le magasin était censé fermé, mais elle a eu tellement de peine pour moi qu’elle a ouvert.

 Et c’est avec elle que j’ai trouvé LA robe de ma vie !

Durant les essayages, je lui ai quand même posé la question qui m’obsédait : de quelle taille sont les robes que j’essaie ? Je n’avais pas osé demandé dans la première boutique, de peur de leur réponse. Et c’est avec toute la bienveillance dont elle faisait preuve depuis le début, qu’elle m’a annoncé que toutes les robes que j’avais essayées étaient du 42-44. Moi qui encore en septembre 2020 faisait une taille 48, j’arrive maintenant à rentrer dans 2 tailles voir 3 tailles de moins.

Mais alors pourquoi ? Pourquoi ce SUPPLEMENT GRANDE TAILLE ? Parce qu’on ne fait pas un petit 36 ou 38 nous sommes considérées comme grosses ? Qui a décrété cela ? Parce que nous n’avons pas une taille mannequin nous devons payer plus que les autres ?

J’accuse la première boutique de Grossophobie. J’accuse cette boutique de préjudice moral.

C’est à travers cet article, à travers mes mots, que je m’arme pour combattre LA GROSSOPHOBIE !

Mademoiselle Manolita 

(lien de l'image de couverture https://www.neonmag.fr/tu-es-grosse-les-garcons-naiment-pas-ca-ca-les-degoute-grossophobie-nos-lecteurs-et-lectrices-temoignent-512300.html )